Qui est Saint Benoît ?
Pour nous, moniales bénédictines, St Benoit est comme un père qui nous conduit sur les chemins de l’Évangile en nous donnant quelques balises tirées de sa propre expérience. Il est aussi bien une référence que celui qui nous lance sur le chemin pour inventer la vie monastique d'aujourd'hui. Voici avec des mots d'aujourd'hui son "CV" !
Situation personnelle
Nom et Prénom : Benedictus (= Benoît), ce qui veut dire béni de Dieu.
Date de naissance : entre 480 et 490
Lieu : à Nursie dans les Apennins, en Ombrie.
Nourrice : Cyrilla
Fratrie : une petite sœur du nom de Scholastique.
Cursus
Adolescent, il est envoyé à Rome pour poursuivre ses études. Mais écoeuré par la vie de décadence qui l’entoure, il décide un beau jour de quitter la ville, à la recherche de Dieu.
Après une rencontre avec un moine du nom de Romain, il se retire dans la solitude dans une grotte de Subiaco. Puis il est rejoint par des hommes qui veulent devenir ses disciples. Alors Benoît commence à organiser une petite communauté.
Puis il est amené à quitter Subiaco pour aller au Mont Cassin. Il en deviendra Père Abbé et c’est là qu’il rédigera sa « Règle » pour préciser comment l’expérience spirituelle du moine doit être vécue au quotidien.
Pour en savoir plus, voir ci-dessous
Réalisations
Son best-seller : Sa Règle. C’est au Concile de Latran en 1215 que cette règle devient la norme exclusive de la vie monastique en Occident.
Titres : Nommé « Patron de l’Europe » par Paul VI, en 1964.
Il fut « un messager de Paix »,
« un Maître de culture »,
« un Hérault de la foi chrétienne »
et « le fondateur de la vie monastique en Occident ».
Ses miracles : Lire le livre II des dialogues de St Grégoire le Grand.
Objet qui le caractérise : un livre. Les moines bénédictins ont recopié les codex latins afin de pouvoir les conserver et les transmettre.
Sa parole de Vie : « Ne rien préférer à l’amour du Christ ».
D'après St Grégoire
La VIE DE SAINT BENOIT de Nursie fut rédigée par le Pape Saint Grégoire le Grand en 593-594, soit environ 30 ans après sa mort. Il ne s’agit pas d’une biographie au sens moderne du mot mais d’une HAGIOGRAPHIE. Saint Grégoire nous présente d’abord en Benoît un modèle de sainteté. Les faits merveilleux tiennent une grande place dans le récit.C'est que, pour Saint Grégoire, il s’agit de montrer comment le CHRIST saisit un cœur prêt à se donner et manifeste sa puissance, enseignant et édifiant l'Église à travers son ami.Saint Grégoire n'est pas historien au sens moderne, c’est un auteur spirituel qui nous présente une doctrine à travers la sélection de courts récits de la Vie de Benoît. Lire ce texte conduit à voir, presque à toucher l’œuvre de Dieu et l'action du Saint Esprit dans le cœur d’un homme.Aujourd’hui nous aimons retrouver sur le visage des saints la trace de nos luttes, nous sommes sensibles à leurs tâtonnements et à leurs échecs. Alors ils nous paraissent plus proches, tissés de cette même pâte humaine et leur vertu semble plus accessible.
La vie de St Benoit
Il y eut un homme de sainte vie, Benoît - BENEDICTUS - béni par la grâce et par le nom.
Dès le temps de sa jeunesse, il portait en lui un cœur digne de celui d’un vieillard (par la sagesse). Issu d’une bonne famille de Nursie, on l’envoya à Rome pour s’y livrer à l’étude des lettres. Mais il s’aperçut que c’était l’occasion de tomber dans l’abîme des vices. Méprisant donc l’étude des lettres, il se mit en quête d’un genre de vie sainte. Il se retira donc, savamment ignorant et sagement inculte.
Alors aussitôt, il consola sa nourrice avec tendresse et lui remit en bon état le crible qu’il avait emporté en morceaux. La chose fut connue de tout le monde. Pendant bien des années l’objet demeura là sous les yeux de tous suspendu à l’entrée de l’église jusqu’à l’époque des Lombards.
Benoît, plus désireux de se fatiguer dans les travaux de Dieu que d’être loué en ce monde, gagna une retraite dans un lieu désert, "Subiaco", à 40 milles de Rome.
Un moine, Romain, le voit et l'interroge. Benoît lui confie son désir. Romain garde le secret et l'aide à réaliser son vœu. Il lui donne l’habit et lui rend tous les services possibles. L’homme de Dieu, Benoît, gagne une grotte où il demeure pendant 3 ans inconnu des hommes sauf du moine Romain.
Romain vivait dans un monastère non loin de là. Il portait le pain qu’il pouvait soustraire à sa propre portion à Benoît. Il n’y avait pas de chemin de la grotte au monastère de Romain, car un rocher très élevé la surplombait. Romain avait l’habitude de descendre le pain à l’aide d’une très longue corde sur laquelle il avait mis une petite sonnette attachée par une ficelle. Entendant la clochette, l’homme de Dieu était averti que Romain lui apportait du pain, alors il sortait pour le prendre.
Le Dieu tout-puissant résolut désormais que Romain se reposerait de son labeur et que la vie de Benoît serait offerte en exemple aux hommes afin que brille la lumière posée sur le chandelier pour tous ceux qui sont dans la maison (cf. Matthieu 5,15).
Il daigna apparaître en vision à un prêtre qui demeurait un peu plus loin. - "Toi, tu te prépares un délice et mon serviteur, en ce lieu, est torturé par la faim". Il se leva, en ce jour de Pâques, avec le repas qu’il s’était préparé et se mit en quête du serviteur de Dieu à travers les monts abrupts, les vallées encaissées et les terres défoncées. Il le trouva enfin caché dans la grotte. Ils prièrent ensemble, bénirent le Seigneur et s’assirent pour échanger de doux entretiens spirituels. Ensuite le prêtre dit :
- "Mangeons ensemble car c’est Pâques aujourd’hui".
L’homme de Dieu répondit : - "Je sais que c’est Pâques puisque j’ai la grâce de te voir".
Vivant loin des hommes, Benoît ignorait qu'on fêtait en ce jour la solennité de Pâques. Le prêtre affirma : - "Oui vraiment c’est aujourd’hui le jour pascal de la Résurrection du Seigneur. Il ne convient pas de jeûner aujourd'hui. Le Seigneur m'a envoyé pour que nous partagions ses dons".
Alors, ayant béni Dieu, ils prirent de la nourriture. Puis, ayant achevé le repas et l’entretien, le prêtre revint à l’église.
Le Père d'une communauté monastique à proximité mourut. Toute la communauté se rendit auprès du vénérable Benoît pour le supplier de venir diriger la communauté. Il refusa longtemps, prédisant qu'il ne pourrait s'accommoder de leurs mœurs. Un jour, vaincu par leurs prières, il consentit.
Néanmoins, comme il prenait garde à la vie régulière dans le monastère et qu'il n'accordait licence à personne comme auparavant de poser des actes illicites en déviant à droite ou à gauche du droit chemin, les frères devinrent fous de colère. Ils voyaient qu'avec Benoît l'illicite n'était plus licite. La vie des bons est toujours un poids pour les dépravés.
Ils cherchèrent ensemble un bon moyen pour le faire mourir. Ils mélangèrent du poison au vin. Le verre contenant le poison fut présenté au Père afin qu'il le bénisse selon la coutume du monastère. Benoît fit un signe de croix et le récipient tenu à distance se brisa à ce signe : le vase de la mort fut mis en pièces comme s'il avait reçu une pierre au lieu du signe de croix.
- "Que le Dieu Tout-puissant ait pitié de vous, frères ! Pourquoi avez-vous essayé de me tuer ? Ne vous avais-je pas dit dès le début que vos mœurs ne pourraient s'accommoder avec les miennes ? Allez donc trouver un père selon vos mœurs. Ne comptez plus sur moi."
Il revint alors au lieu de sa chère solitude et, seul sous le regard de Celui qui voit d'en-haut, il habita avec lui-même.
Il veillait sans cesse à sa propre garde, se voyant toujours sous les yeux de son Créateur. Il se maintint lui-même dans le cloître de sa pensée.
Le saint homme croissait en vertus et en miracles et beaucoup furent attirés et se rassemblèrent pour servir le Dieu Tout-puissant.
Un jour, Placide sortit pour puiser de l'eau dans le lac. Il fit avec son seau un geste imprudent et tomba dans l'eau. Aussitôt le courant l'entraîna vers le large. L'homme de Dieu, à l'intérieur de sa cellule, eut aussitôt conscience de ce qui s'était passé et appela Maur en toute hâte :
- "Cours ! Placide est allé puiser de l'eau, il est tombé dans le lac !"
Chose admirable et qui ne s'était pas reproduite depuis l'apôtre Pierre ! Maur demande la bénédiction de Benoît et court. Se croyant toujours sur la terre ferme, il continue sa course sur l'eau jusqu'à l'endroit où était l'enfant. Il le saisit par les cheveux et revint toujours en courant. A peine eut-il touché terre et repris ses esprits qu'il jeta un regard derrière lui... Étonné et tout tremblant, il vit quel miracle avait été accompli !
De retour chez le Père, il lui rendit compte de cet exploit. Le vénérable homme de Dieu, Benoît, lui, se mit à attribuer la chose non à ses propres mérites mais à l'obéissance de son disciple. Maur, au contraire, disait que c'était dû uniquement à son ordre : il était bien conscient que cela ne venait pas de sa propre vertu puisqu'il avait agi inconsciemment.
Dans cet assaut d'humilité réciproque et amical, l'enfant sauvé intervint comme arbitre.
- "Moi, lorsque j'étais retiré de l'eau, je voyais au-dessus de ma tête le capuchon du Père Abbé, c'était lui qui me tirait hors de l'eau."
Le feu de l'amour de notre Dieu et Seigneur Jésus-Christ grandissait. Beaucoup de gens quittaient la vie du siècle et se mettaient sous le joug du Rédempteur. Il est courant que les méchants jalousent le bien spirituel des autres.
Un prêtre de l'église voisine, se mit à envier les vaillantes entreprises du saint homme, à vilipender son genre de vie et à barrer la route à ceux qui lui rendaient visite. La jalousie l'aveugla au point qu'il fit parvenir au serviteur du Dieu Tout-puissant un pain farci de poison sous couleur d'offrande bénite ! L'homme de Dieu le reçut avec action de grâce, mais la peste que recelait ce pain n'eut pas de secret pour lui.
A l'heure du repas, un corbeau avait coutume de venir prendre du pain dans sa main. Il vint comme d'habitude. L'homme de Dieu jeta devant lui le pain que le prêtre lui avait fait parvenir :
"Au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, prends-moi ce pain et jette-le là où personne ne puisse le retrouver".
Alors, ouvrant la bouche, étendant les ailes, le corbeau se mit à sautiller autour du pain et à émettre de petits croassements. Il voulait bien obéir mais ne pouvait accomplir cet ordre.
- Va, sois tranquille, jette ça dans un endroit impossible à trouver".
Après de longues hésitations, le corbeau prit ce pain empoisonné dans son bec, il s'envola et s'éloigna. Au bout de trois heures, le pain ayant été jeté, le corbeau revint et l'homme de Dieu lui donna sa pitance accoutumée.
Le roi Totila avait entendu dire que le saint homme avait l'esprit de prophétie. Il fit annoncer son arrivée au monastère. Comme il avait l'esprit retors, il voulut tester si Benoît avait vraiment l'esprit de prophétie. Il revêtit un de ses soldats de ses habits royaux et lui donna l'ordre de se présenter à l'homme de Dieu. Il lui donna une escorte pour faire croire que c'était lui le roi Totila.
Totila, roi des Goths, règne 10 ans (542-552) Quand l'homme de Dieu le vit venir, il dit :
- "Mon fils, quitte ces vêtements qui ne sont pas à toi ! "
Ils retournèrent tous au plus vite vers Totila épouvantés et lui racontèrent en tremblant avec quelle rapidité ils avaient été découverts.
Totila n'osait pas approcher de l'homme de Dieu. Il demeurait prosterné à distance. Benoît, serviteur du Seigneur Jésus-Christ, s'approcha en personne, le releva et lui fit des reproches sur son inconduite.
- "Tu fais beaucoup de mal, tu en as fait déjà beaucoup. Maintenant tâche de mettre un frein à l'injustice. Tu entreras dans la ville de Rome, tu traverseras la mer, tu régneras 9 ans encore et tu mourras la 10ième."
A ces mots, le roi fut terrifié. Il demanda une prière de bénédiction et s'en alla. Il fut désormais moins cruel. La prophétie de Benoît se réalisa, il mourut la 10ième année.
Benoît avait une sœur, Scholastique, consacrée au Dieu tout-puissant depuis son enfance. Elle rendait visite à son frère une fois par an et l'homme de Dieu descendait à sa rencontre, dans la propriété du monastère.
Une fois, elle vint comme d'habitude et son vénérable frère, accompagné de ses disciples, descendit à sa rencontre. Ils passèrent la journée à parler de Dieu et à le louer. Le soir ils prirent ensemble leur nourriture en prolongeant leurs entretiens spirituels. Soudain Scholastique demanda :
- "Je t'en prie, reste cette fois jusqu'au matin pour que nous puissions parler encore des délices de la vie céleste.
-"Que dis-tu là, ma sœur ? Impossible ! "
Le ciel était serein, aucun nuage dans l'air...
Devant le refus de son frère, la sainte femme joignit les doigts, posa les mains sur la table et s'inclina pour prier le Seigneur Tout-puissant. Quand elle releva la tête, éclairs et tonnerre éclatèrent avec une telle force et l'inondation fut telle que ni le vénérable Benoît, ni les frères qui l'accompagnaient ne purent mettre le pied dehors pour remonter au monastère.
Scholastique avait répandu sur la table des fleuves de larmes qui avaient attiré un déluge de pluie ! Au milieu des éclairs, du tonnerre et du déluge de pluie, Benoît, contrarié, commença à se plaindre :
-"Que le Dieu Tout-puissant te pardonne ! Ma sœur, qu'as-tu fait ?"
- "Je t'ai prié et tu n'as pas voulu m'écouter. J'ai prié mon Seigneur et lui m'a entendu. Eh bien sors si tu peux ! Rentre dans ton monastère."
Nous avons présenté quelques séquences de la Vie de Saint Benoît, espérant avoir convaincu de la valeur de si grands textes de notre tradition monastique. On trouve aisément la " Vie de Saint Benoît " en général avec la Règle, dans des éditions très abordables - et dans la prestigieuse Collection des Sources Chrétiennes, texte bilingue latin-français.