Cette mention de la montagne, quand Jésus proclame les Béatitudes, est significative.
Moïse avait reçu la première Loi sur la montagne du Sinaï et, redescendu l’avait transmise au peuple. Ici Matthieu nous montre que Jésus, nouveau Moïse, veut nous donner une Loi nouvelle, reçue de Dieu. Alors que le Décalogue ne donnait que des prescriptions négatives, à part le respect des parents, la Loi nouvelle nous oriente vers des attitudes positives.
La Loi ancienne indiquait des limites à ne pas franchir, celle ci nous ouvre des horizons nouveaux.
Si l’évangéliste écrit « il ouvrit la bouche », détail qui va de soi, c’est pour nous faire comprendre que nous allons assister à un vrai commencement, et que ce Jésus qui se met à parler, vient relayer celui qui autrefois avait parlé à Moïse. La première chose que nous annonce Jésus est le bonheur, un bonheur qui n’est pas l’objet d’une conquête, mais qui est un don.
Contrairement à d’autres textes, les Béatitudes ne sont pas à l’impératif : il n’est pas dit : « Soyez pauvres…recherchez la justice, etc… ». Il ne s’agit pas d’un traité de morale, mais d’une constatation, une révélation. Révélation nécessaire car il n’est pas évident que la pauvreté en esprit, la persécution à cause du nom de Jésus, fassent d’emblée bon ménage, même si les apôtres, après avoir été flagellés se disent heureux. Heureux donc, et pas seulement plus tard dans la vie éternelle, mais tout de suite car la foi d’aujourd’hui est anticipation de notre avenir bienheureux. C’est donc l’espérance qui est à la source d’un bonheur actuel. Une fois de plus il nous est dit que nous sommes en route vers un accomplissement. Il va falloir descendre du Sinaï et marcher vers la terre promise
Qui est bienheureux ?
Les Béatitudes qui résument tout le message évangélique ne prescrivent aucun devoir envers Dieu ou le Christ. Nulle part il n’est dit « Bienheureux ceux qui aiment Dieu par dessus tout » Ni même « Bienheureux ceux qui suivent le Christ ». On retrouve ici quelque chose qui rappelle ce passage où Jésus déclare que ceux qui ont nourri leur prochain l’ont nourri lui-même. Ainsi les destinataires des Béatitudes, les déclarés bienheureux, peuvent être des musulmans, des bouddhistes et même des athées. Toute sainte qu’elle soit l’Église n’a pas le monopole de la sainteté, mais le peuple des croyants au Christ sait et proclame que tous ceux qui n’adorent pas la richesse, qui souffrent, qui cherchent la justice, qui pardonnent…sont animés par ce Verbe qui fonde toute existence et toute vérité et qui a pris visage humain dans le Christ.
L’Esprit souffle où il veut et dans les lieux les plus inattendus. Nous avons la charge certes d’annoncer l’Evangile et de proposer le Christ comme porteur de toute la Vérité sur Dieu et sur l’homme, mais nous avons aussi à l’identifier partout où il se manifeste, perceptible seulement aux yeux de la foi. Nous verrons alors qu’il remplit l’univers. Le plus souvent ignoré, mais toujours à l’œuvre pour donner le bonheur.
Quelle joie de le découvrir partageant notre table !
« Dieu était là, et je ne le savais pas ! »
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