Les pharisiens et les publicains étaient les deux grandes figures du pouvoir au temps de Jésus, le pouvoir religieux, qui se trouvait lié à la « chaire de Moïse » qu’ils occupaient, et le pouvoir de l’occupant romain. Jésus, du fait qu’il n’appartenait à aucun parti, qu’il n’était ni prêtre ni fonctionnaire, n’avait aucun pouvoir sinon celui de sa parole et de ses miracles ce qui les gênait beaucoup. D’abord divisés à son sujet, ils avaient fini par faire un front commun contre lui.
En rappelant les controverses qu’ils eurent avec Jésus, saint Matthieu voulait aussi parler de ce qui se passait dans la première communauté chrétienne. Elle connaissait comme tout groupe humain, quelle que soit sa dimension, familiale, religieuse ou nationale, les mêmes ferments de désagrégation que celle du temps de Jésus. Le principal tient à l’exercice du pouvoir que nous avons tous, soit de construire, soit de démolir. Ceux dont le pouvoir est très réduit ne sont pas les moins pénibles. Les petits chefs sont souvent les plus redoutables.
Le premier but de cet évangile est donc une mise en garde quant à notre façon d’exercer le pouvoir.
Le pouvoir absolu, nous le savons, rend fou. Nous en avons hélas périodiquement de tristes exemples dans l’histoire
Mais Jésus n’est pas venu seulement pour dénoncer l’hypocrisie des pharisiens, leur double langage, ni pour énoncer des mises en garde de portée générale, il vient pour nous dire comment vivre. Il le fait en vivant avec nous, en nous révélant le vrai visage du Père, en nous montrant comment Il agit aujourd’hui parmi nous, et comment nous devons agir, nous qui avons été créés à son image et ressemblance.
Il a choisi de se faire non pas dominateur, mais serviteur. C’est cela qui explique tout son comportement. Nous ne pouvons lui ressembler qu’en suivant son itinéraire. Nous connaissons bien le grand texte de la lettre de St Paul aux Philippiens (chapitre 2) : « Lui, qui était de condition divine, ne retint pas le rang qui l‘égalait à Dieu » Tout cela il l’a vécu…Il nous donne son Esprit pour que nous le suivions
Nous manquons souvent d’assurance, nous sommes habités par la peur de ne pas être assez ceci ou cela, mais c’est surtout de foi que nous manquons. Au lieu de construire notre vie sur l’amour que Dieu nous donne, nous nous appuyons sur la considération des autres.
Nous oublions que c’est d’abord sur nous-mêmes que nous avons à exercer une domination, sur nos instincts, nos défauts, pour travailler à faire exister les autres. « Celui qui veut conserver sa vie la perd…on ne la reçoit qu’en la donnant »
Les pharisiens sont toujours présents parmi nous, en chacun de nous.
Ne les imitez pas nous dit Jésus :
« Vous m’appelez Maître et Seigneur, et vous dites bien, car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. Je vous ai donné l’exemple pour que vous agissiez comme moi aussi j’ai agi envers vous » Jn 13/13