Homélie du P. Jean-Marc Chéné, ocso
L’illustration la plus visible de la parabole que nous venons d’entendre se trouve devant nos yeux, disposée par la sœur qui a préparé les bouquets pour ce dimanche. Une petite graine jetée en terre a produit cette tige d’avoine avec ses flocons. Elle a donc été jetée dans une bonne terre pour croître et produire le fruit de sa semence.
Des trois premiers types de terrain dont parle Jésus, seule la bonne terre offre les conditions voulues au grain semé pour qu’il donne du fruit. Et même dans ce cas, les rendements peuvent varier de cent pour un à soixante pour un, ou même trente pour un. Bien sûr, la préparation du terrain, le soin apporté aux cultures et la météo ont leur importance, mais la nature du sol est déterminante.
En racontant cette parabole, Jésus n’avait pas du tout l’intention d’apprendre quelque chose de nouveau sur le plan de la culture à ses auditeurs. Pourquoi a-t-il donc raconté cette parabole ? C’est la question des disciples qui semblent étonnés : « pourquoi leur parles-tu en paraboles ? »
Pour une fois d’ailleurs, leur question leur vaut une petite consolation : « à vous, il est donné de connaître les mystères du Royaume des Cieux, mais ce n’est pas donné à ceux-là ! », « heureux vos yeux puisqu’ils voient et vos oreilles puisqu’elles entendent ! Amen, je vous le dis : beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que vous voyez et ne l’ont pas vu, entendre de que vous entendez, et ne l’ont pas entendu ».
Pendant trois dimanches consécutifs, nous allons entendre Jésus parler en paraboles. Ce procédé lui permet, dans un langage accessible, d’essayer de faire entrer dans la compréhension de réalités plus complexes, dans l’intelligence des mystères du Royaume. « Si je leur parle en paraboles, dit-il à ses disciples, c’est parce qu’ils regardent sans regarder et qu’ils écoutent sans écouter ni comprendre ». Le prophète Isaïe s’en plaignait déjà comme le rappelle Jésus en le citant, un peu plus loin dans le récit de cette parabole : « le cœur de ce peuple s’est alourdi : ils sont devenus durs d’oreille, ils se sont bouché les yeux. ».
Qu’y a-t-il donc à voir, à entendre et à comprendre ? Jésus le dit lui-même : le grain semé en terre, c’est sa parole qui annonce et établit le Royaume. Elle ne peut porter un fruit spirituel, un fruit de charité et de connaissance de Dieu que si celui qui l’écoute la reçoit vraiment, que si sa foi, sa prière, et son désir ont un enracinement profond. À défaut d'enracinement profond dans le cœur, la parole perd de sa vigueur et ne peut nourrir la foi qui va alors au gré des humeurs du moment et des idéologies sans grand lendemain. Plus qu’une petite histoire, la parabole retentit donc, pour chacune et chacun d’entre nous, comme un appel à cultiver la bonne terre pour qu’elle fasse porter son fruit à la semence.
Jésus fait aussi comprendre que cela vaut le coup de perdre un peu de temps, parfois un peu d’argent et sûrement beaucoup d’énergie pour semer largement. Sauf conditions désastreuses, le paysan, le semeur, sait que la récolte va en principe l’emporter sur l’apparente perte de grains tombés en mauvaise terre.
Il sait que certains grains vont donner cent pour un, d’autres soixante, et d’autres trente. Pour lui, ce dernier rendement, même faible, a déjà sa valeur.
Tout comme « la pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre », ainsi la parole du Seigneur ne lui « reviendra pas sans résultat, […] sans avoir accompli sa mission ». Cette parole semée en nos cœurs nous est confiée, comme le grain à la terre, bonne ou pierreuse. Quelle terre offrons-nous ?
Beaucoup de personnes prennent le temps, avant de partir au travail, au début de la journée ou le soir, pour lire la Parole de Dieu et la laisser leur parler. Beaucoup de groupes se réunissent régulièrement pour approfondir le message de la Bonne Nouvelle, pour partager et prier, pour la laisser porter son fruit de vie. Au monastère, cette Parole divine est offerte en abondance, particulièrement dans la liturgie quotidienne et pendant ce temps spécifique de lecture personnelle que nous appelons la lectio divina.
Quelle chance avons-nous de laisser résonner cette Parole, de pouvoir accueillir ce qu’elle nous donne à comprendre, l’espérance qu’elle nous ouvre, là où les réponses humaines se font attendre ou restent insatisfaisantes.
Que cette parole trouve en notre cœur une bonne terre qui lui fasse porter un fruit de conversion, un fruit de vie, de paix, d’amour ! Qu’elle éclaire notre foi et nourrisse notre prière !
Prière universelle
Prions Dieu notre Père.
Que notre prière monte vers lui comme un fruit de sa parole.
Pour le Pape François et tous les serviteurs de la Parole :
afin qu’ils soient des semeurs inlassables de l’évangile dans le champ du monde,
prions Dieu notre Père.
R/ I 12 Dieu d’amour , écoute-nous !
Pour les responsables politiques et économiques :
afin qu’ils œuvrent pour une vraie liberté de leurs peuples
et aboutissent à des solutions de vérité, de justice et de paix,
prions Dieu notre Père.
Pour les vacanciers en cette période de halte :
afin qu’ils trouvent des moments de pause et de ressourcement
pour se mettre à l’écoute de la parole de Dieu,
prions Dieu notre Père.
Pour ceux dont ces vacances seront un temps de solitude pesante:
afin qu’ils reçoivent dans leur cœur
la rosée bienfaisante d’une parole fraternelle qui fait fleurir l’espérance,
prions Dieu notre Père.
Pour nous tous ici rassemblés :
afin que nous laissions l’Esprit-Saint transformer notre cœur
pour en faire une terre fertile qui porte des fruits de joie et d’amour ,
prions Dieu notre Père.
Dieu notre Père, reçois nous t’en prions notre prière pour notre monde
afin que germe la semence du Royaume par Jésus le Christ notre Seigneur.
Amen.