Homélie
Prière universelle
Homélie du P. Désiré

Dans la vie quotidienne, il y a un instrument indispensable que nous portons toujours avec nous : la clef. Elle est si importante que dans certaines traditions, pour l’installation d’un gouverneur, délégué ou maire d’une ville, il y a en bonne place la cérémonie de la remise symbolique de la clef de la ville. Par cet acte, on voudrait signifier que désormais cette personne a le pouvoir d’allées et venues sur cette ville. Empruntant aux paroles de Jésus que nous lisons dans l’évangile d’aujourd’hui : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise ; et la puissance de la mort ne l'emportera pas sur elle » (Mt 16, 18), depuis le 16ème siècle, les insignes officiels du Saint Siège sont représentés justement aussi par les clés, en l’occurrence deux : une en or placée à droite et faisant allusion au pouvoir sur le royaume des cieux, et l’autre en argent, à gauche, indiquant l’autorité spirituelle de la papauté sur la terre. Tout un symbole qu’on a nommé « le pouvoir des clefs » pour signifier et justifier l’autorité qu’aurait le Pape, en tant que successeur légitime de Pierre. Cette posture a suscité beaucoup de controverses au temps de la Réforme notamment avec Luther qui soutenait que ce pouvoir ne concernait que le pardon ou non des péchés.

Frères et sœurs, sans entrer dans ces querelles qui ne nous intéressent plus aujourd’hui, le message de la parole de Dieu de ce dimanche nous permet de nous arrêter sur le « pouvoir des clefs ».

Dans la première lecture, le prophète Isaïe promet la clef de la maison de David (Is 22, 19-23) à Eliakim, serviteur de Dieu qui va remplacer le gouverneur indigne. S’il ouvre, personne ne fermera ; s’il ferme, personne n’ouvrira. En effet, nous sommes à la cour de Jérusalem sous le règne d’Ezéchias, à environ 700 av.J.C. Shebna est gouverneur du palais. En tant que tel, il a reçu lors de son intronisation les clefs du palais royal dont l’usage lui permet de se retrouver souvent en présence du roi. Or, être en présence du roi, c’est avoir la possibilité de lui chuchoter à l’oreille. Mais, le gouverneur Shebna va abuser de l’autorité que lui confère « le pouvoir des clefs », et il va abuser également de la confiance placée en lui en donnant de mauvais conseils au roi. C’est dans ce contexte qu’intervient le prophète Isaïe, et lui fait deux reproches : d’abord le fait d’être un mauvais conseil pour le roi en l’ayant entraîné à faire une alliance avec l’Egypte ; ensuite le fait de se préoccuper de ses propres intérêts et non de ceux du peuple de Dieu pour lequel il était appelé à être un « père ». Pour s’être comporté ainsi, Isaïe annonce au gouverneur Shebna sa destitution et son remplacement au profit d’un nouveau gouverneur : Eliakim, qui saura lui, servir véritable le peuple de Dieu.

Dans la scène de l’évangile qui se produit quelques siècles plus tard, Jésus confie à Pierre les clés du Royaume des Cieux et lui dit : « tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. » (Mt 16, 19). Certainement en raison de ces paroles de Jésus, l'iconographie chrétienne représente l’apôtre Saint Pierre avec des clés. Mais comment Jésus a-t-il pu donner un pouvoir si exorbitant à l’homme ? Que signifie ce pouvoir donner à Pierre de « lier » et « délier » ?

Observons d’abord que Jésus remet ce pouvoir à Pierre après qu’il ait confessé que « Jésus est le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Mt 16, 16). Comme quoi, « le pouvoir des clés » remis à Pierre est une réponse à un acte de foi, elle-même fondée sur l’amour. En d’autres termes, « le pouvoir des clefs » remis à Pierre est la réponse de confiance de Jésus à la confession de son apôtre. Il ne s’agit nullement d’un droit d’ouvrir pour lui-même et pour ses proches les portes du royaume des cieux. Il s’agit plutôt d’une mise en marche de Pierre vers la foi en/et pour un Dieu qui s’est révélé à l’homme non pas comme un Dieu de puissance et de majesté, mais comme un Dieu d’Amour livré pour nous les hommes afin de nous libérer de nos péchés. C’est parce que Jésus assume la confiance que Pierre à placé en Lui qu’il envoie conséquemment en mission pour être le roc sur lequel construire son Eglise. On peut donc déduire finalement que si Jésus s’appuie sur Pierre pour construire son Église, et lui donne « le pouvoir des clés » c’est bien parce que ce dernier a écouté sa Parole et c’est aussi pour qu’il attire à lui des hommes dans la foi et en faire les membres de l’Eglise, c’est-à-dire, corps du Christ.

Quant à l’intrigue du palais de la première lecture, le prophète Isaïe nous amène à prendre conscience que Dieu est au milieu de nous ; Il ne faut pas le chercher ailleurs comme Shebna est allé le chercher en Egypte. Dieu se révèle dans nos histoires quotidiennes et non ailleurs. Il nous faut donc lire sa présence dans nos actes de tous les jours. Par ailleurs, le prophète Isaïe, nous permet de voir aussi comment doit se comporter un serviteur de Dieu : toujours se mettre au service du peuple comme Dieu lui-même ne cesse de le faire.  Une manière de dire à ceux qui ont « les pouvoirs des clefs » dans l’Eglise comme dans le monde que la seule raison de ce pouvoir, est l’intérêt du peuple. Voilà pourquoi, la grâce de Dieu accompagne tout celui qui assume des responsabilités en se souvenant de Lui ; et, cette grâce fait défaut à ceux qui ne mettent pas Dieu au centre de leurs actions.

Finalement, en rapprochant ces deux compréhensions du « pouvoir des clefs » de la première lecture et de l’évangile, peut-être, pour être bien comprise, l’image des clés ne doit pas se restreindre à l’aspect du pouvoir mais s’élargir à celui du discernement (cf. Marc Girard, « le symbolisme de la clé », 2016) en tant qu’il est une responsabilité qui incombe à tous les disciples et non pas seulement à l’apôtre Pierre comme le rappelle Jésus lui-même, un peu plus loin toujours dans l’évangile selon St. Matthieu, lorsqu’il leur dit à tous, et non à un seul : « En vérité je vous le dis, tout ce que vous lierez sur la terre sera lié au ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié au ciel. » (Mt 18,18).

Plaise donc au Seigneur de nous donner la grâce de savoir nous aussi écouter sa Parole afin qu’en nous et par nous Dieu puisse bâtir son Eglise à travers nos actions sur les routes du monde et surtout que cette Église soit pour nous instrument de communion à Dieu. Amen.                        Désiré Ayina, sj.

Prière universelle

« Ô profondeur de la richesse,
de la sagesse et de la science de Dieu !
…Tout est de Lui, par Lui, et pour Lui. »
Tournons-nous vers Lui avec confiance.

Pour notre Pape François,
qui annonce à l’Église et au monde,
avec courage et ténacité, la Joie de l’Évangile,
ensemble prions.

R/I-12 : « Dieu d’amour, écoute-nous ! »

Pour les responsables politiques et économiques
qui ont reçu charge de gouverner,
afin que l’humanité, la justice et la droiture guident leurs décisions,
ensemble prions.

Pour les enseignants qui préparent cette nouvelle année scolaire,
afin qu’ils ne se découragent pas devant l’étendue de la tâche,
et gardent en priorité le bien de leurs élèves,
ensemble prions.

Pour les victimes des guerres et des famines,
pour les migrants, et ceux qui souffrent,
afin qu’ils reçoivent le réconfort
par la visite d’un frère qui soigne et compatit,
ensemble prions.

Pour nous tous rassemblés ce matin en cette Eucharistie,
et qui avons reçu cette parole de Jésus : « pour vous qui suis-je ? »,
afin que nous prenions le temps de chercher en notre cœur notre réponse,
ensemble prions.

Seigneur notre Dieu, c’est toi qui bâtis ton Église et la garde.
Accueille notre prière,
et nous marcherons dans la joie vers le Royaume que tu nous promets,
Par Jésus le Christ notre Seigneur.
Amen

Abbaye
Notre Dame de
Jouarre