Il y a plus de 2000 ans, un peu avant la venue du Christ, l’auteur du livre de la Sagesse était saisi par l’énigme et le mystère de toutes choses :
« nous avons peine à nous représenter ce qui est sur terre (…) ; ce qui est dans les cieux, qui donc l’a découvert ? »
Qu’aurait dit ce même auteur aujourd’hui, alors que les découvertes de la science nous rendent toujours plus conscients de la complexité de la nature et de l’immensité de l’univers ?
Pourtant, le livre de la Sagesse reconnaissait que, malgré toutes les énigmes de la nature et du monde, des habitants de la terre avaient su découvrir la volonté de Dieu, parce qu’ils avaient accueilli en eux la Sagesse et l’Esprit Saint.
Mais qu’est-ce que découvrir la volonté de Dieu ? Avant la venue du Christ, il y avait déjà des chemins pour cela ; la Loi d’Israël, avant tout, donnait des repères, des indications, des commandements pour savoir ce qui plaît à Dieu, ce qui est sa volonté ; et quant à ceux qui n’appartenaient pas au peuple d’Israël, ils pouvaient eux aussi être guidés par certaines lois de leurs nations, et surtout ils pouvaient suivre la voix de leur conscience lorsqu’elle leur faisait percevoir ce qui est juste et bon.
Avec le Christ, une nouveauté survient : connaître ce qui plaît à Dieu, faire sa volonté, cela passe désormais par le fait de devenir disciple de Jésus. Et cela de manière radicale, comme nous l’avons entendu dans l’évangile :
« si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. »
Nous nous interrogeons sans doute : cette parole n’est-elle pas trop dure à entendre ? comment comprendre que Jésus nous demande de le préférer à ceux et celles qui nous sont légitimement chers, et envers qui nous avons même des devoirs impérieux dans certaines situations ?
À cela une première réponse nous est donnée par la suite de l’évangile, qui invite à la prudence et à la sagesse. Si l’on veut bâtir une tour, il faut commencer par s’asseoir pour calculer la dépense. Si un roi part en guerre contre un autre, il doit commencer par s’asseoir pour voir si ses troupes sont assez nombreuses. Cela relève, selon le langage paulinien, du « discernement ». Certes, l’appel de l’évangile est radical, mais la réponse à cet appel doit tenir compte de chaque situation, des forces qui nous sont données, et plus que tout de nos vocations qui sont diverses suivant les personnes – selon qu’il s’agit d’hommes ou de femmes mariés, de personnes célibataires, de prêtres, de religieuses ou de religieux.
Mais ce que nous avons par contre à entendre, c’est que
– quelles que soient nos situations – nous avons à être disciples de Jésus,
et que c’est la priorité de notre vie baptismale.
Cela implique que, en effet, nous donnions une préférence inconditionnelle à Jésus.
C’est bien ce que font à leur manière l’homme et la femme lorsqu’ils s’unissent dans le sacrement de mariage : préférer le Christ, dans leur cas, cela se vit justement au cœur même de leur vie d’époux ; leur amour mutuel (dont le Pape François a si bien parlé dans sa récente exhortation La joie de l’amour) est un amour qui participe de l’amour du Christ pour son Église ; cet homme et cette femme sont disciples de Jésus par leur manière même d’être ainsi unis l’un à l’autre. Être disciple de Jésus, c’est aussi ce que vivent des parents chrétiens lorsqu’ils ont à cœur d’initier leurs enfants à la foi et de les faire grandir dans cette foi (quels que doivent être ensuite les chemins de ces enfants, une fois devenus plus grands) ; de tels parents sont ainsi, à leur manière propre, disciples de Jésus. Nombre de célibataires également, engagés au service de l’Église, sont à leur façon disciples de Jésus. Et il y a aussi les prêtres, les religieux, les religieuses, qui sont appelés à être disciples de Jésus d’une autre façon encore, par leur vie consacrée ou leur ministère apostolique. Comment ne pas évoquer enfin, aujourd’hui, la figure de Mère Teresa (canonisée à Rome en ce 4 septembre), et le témoignage des sœurs et frères missionnaires de la charité, vivant la condition de disciples à travers le choix radical d’une existence au service des plus pauvres ?
La condition de disciple, nous le voyons, se vit ou doit se vivre de mille et une manières, selon la diversité des situations. Mais dans tous les cas, nous comprenons à la lumière de l’évangile que cette condition implique des options, des renoncements, des manières de porter sa croix, et cela dans le quotidien comme dans les circonstances plus exceptionnelles de la vie. Il n’y a pas à s’en étonner ni à s’en inquiéter : dans ce monde, qui certes contient tant de splendeurs, mais qui souvent est menacé par de fausses séductions et par toutes formes de mal (et qui de nous n’en est pas un jour ou l’autre complice ?), dans ce monde il est inévitable que la condition de disciple du Christ soit pour une part un chemin de croix.
Mais elle est surtout un chemin de joie. La joie d’un François d’Assise, d’un François Xavier, d’une Mère Teresa. Mais aussi la joie de tous les baptisés qui, dans l’état de vie qui est le leur, préfèrent les valeurs du Royaume de Dieu à tout autre bien. La joie des chrétiens qui, quelles que soient leurs difficultés en cours de route, contribuent à édifier la maison de l’Église. La joie des disciples de Jésus qui ne se dérobent pas au combat spirituel mais qui veulent se laisser conduire, dans ce combat même, par l’Esprit de Jésus. La joie de ceux et celles qui à la suite du Christ font de leur vie une existence donnée. La joie de ceux et celles qui sont pauvres de cœur, assoiffés de justice, miséricordieux et artisans de paix. La joie des enfants de Dieu qui sont prêts à sacrifier leur propre vie pour l’Évangile. La joie des serviteurs qui jour après jour, jusqu’à l’heure de leur mort, accomplissent la volonté du Seigneur.
On n’est pas disciple de Jésus sans des renoncements. On n’est pas disciple de Jésus sans porter de quelque manière sa croix. Mais à travers cela même, c’est une joie incommensurable qui nous est promise et déjà offerte.
Heureux les disciples de Jésus,
ceux d’hier, d’aujourd’hui et de demain.
Heureux sont-ils.
Michel Fédou sj
Prière universelle
Tous enfants de Dieu, frères et sœurs dans le Christ Jésus,
prions notre Père :
qu’il ouvre notre cœur et notre prière à tous nos frères humains
R/ EN TON AMOUR, SOUVIENS-TOI DE NOUS. (I 44)
- Pour toutes les familles humaines :
qu’elles connaissent et vivent « la joie de l’amour »,
et que chacun et chacune découvre et aime le Christ, Chemin de Vie,
Prions notre Père.
- Pour les personnes qui aujourd’hui
subissent toutes sortes d’esclavages :
qu’elles soient accueillies quelque part par des frères.
Prions notre Père.
- Pour les victimes du séisme en Italie,
les victimes de toutes les violences, et autres malheurs :
qu’ils soient soutenues et aidés par beaucoup de solidarité.
Prions notre Père.
- Pour nous tous, réunis ce matin pour entendre la Parole du Seigneur
et participer à son Repas :
que nous marchions avec toute l’Église à la suite du Christ.
Prions notre Père.
Dieu notre Père, entends nos prières ;
Enseigne-nous tes chemins qui sont amour et vérité.