Homélie
« A vous la grâce et la paix » !
Voilà, des souhaits qu’on aimerait entendre à tout temps et qui nous arrivent bien à propos en ce début d’année. « A vous la grâce et la paix, de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ » (1 Co 1, 3).
Frères et sœurs, après le temps de l’Avent marqué par l’attente de l’Emmanuel, il a fini par venir et nous nous sommes plongés dans la joie de sa Nativité. Nous avons fait des prolongations la semaine dernière dans notre Eglise particulière de France, mais finalement aujourd’hui, nous rejoignons l'Église universelle pour célébrer le deuxième dimanche du Temps Ordinaire.
Le Temps Ordinaire est une longue marche de maturation chrétienne. C’est un temps qui nous est donné pour apprendre à mieux connaître celui qui fait de nous des chrétiens ; c’est également un temps pour lequel nous sommes appelés à affirmer notre foi en Jésus Christ et à manifester notre engagement à marcher à sa suite dans son Eglise en témoignant de sa présence dans le monde. Vous l’aurez compris, il n’est pas un temps pour nous tourner les pouces. Tout au contraire, ils sont finis les jours de fêtes. Bienvenus dans la dure réalité ordinaire, c’est-à-dire quotidienne, de la vie chrétienne.
Comment marcher à la suite du Christ et témoigner de lui dans le monde, si je ne sais pas qui Il est ? Eh bien, en ce deuxième dimanche du Temps Ordinaire, Jean Baptiste le désigne comme « l’agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde » (Jn 1, 29).
Frères et sœurs, cette expression qu’utilise Jean Baptiste pour présenter le Christ à ses disciples nous est familière ; elle est la même que nous utilisons pour invoquer le Christ dans le Gloria. A l’occasion, après avoir confessé que Dieu est Roi du Ciel et Père tout-puissant, nous invoquons le Christ en le reconnaissant comme Seigneur, « Agneau de Dieu » et Fils du Père. Par la suite, nous le supplions de prendre pitié de nous étant donné qu’Il est Celui qui enlève les péchés du monde. « Seigneur Dieu, Agneau de Dieu, le Fils du Père ; toi qui enlèves les péchés du monde, prends pitié de nous ».
Dans la litanie qui accompagne la fraction du pain eucharistique, pour nous préparer à communier dignement au Pain de Vie, qui est le Christ mort et ressuscité pour le Salut du monde (1 Co 10, 17), c’est en tant qu’« Agneau de Dieu » que, par trois fois, nous lui adressons nos supplications : « Agneau de Dieu, qui enlève les péchés du monde, prends pitié de nous. » Dans le même sillage, lorsque le prêtre nous invite à la table eucharistique pour consommer le Pain Véritable, c’est comme « Agneau de Dieu » que le Christ nous est présenté : « Voici l’Agneau de Dieu, Voici celui qui enlève les péchés du monde. »
Frères et sœurs, l’expression « Agneau de Dieu » nous fait penser aussi dans l’Ancien Testament au Livre de la Genèse (Gn 22, 1-14), lorsque le patriarche Abraham fut mis à l’épreuve par Dieu ; en réponse, Abraham voulut offrir son fils Isaac en sacrifice. En lieu et place, le Seigneur lui offrit un agneau afin qu’il ne portât pas la mort à l’enfant. Comment ne pas nous souvenir de l’« Agneau pascal » du Livre de l’Exode (EX 12, 11-13) consommé sous la conduite de Moïse en cette nuit de la libération d’Egypte et dont Israël devra s’en souvenir comme signe de sa libération ? L’« Agneau de Dieu » évoque également le deuxième chant du Serviteur de Dieu dont parle le prophète Isaïe. Ce serviteur de Dieu est comparé à un « agneau innocent » qui a pris sur lui les péchés de la multitude (Is 53, 4-7. 12).
Enfin dans le Nouveau Testament, nous retrouvons l’expression « Agneau de Dieu » lorsque St. Paul dans la première épître aux Corinthiens affirme que le Christ est l’« Agneau pascal » immolé pour nous (1 Co 5, 7). Le livre de l’Apocalypse n’est pas en reste car, Jean, dans l’hymne des rachetés (Ap 5, 8-13), affirme que l’« Agneau immolé » est digne de louange et d’acclamation par la multitude céleste parce qu’Il a racheté pour Dieu, par le prix de son sang, des gens de toute tribu, langue, peuple et nation. Jean conclut alors que cet Agneau-là est le Nouveau Temple de Dieu et la Nouvelle Lumière (Ap. 21, 22-23). C'est déjà ce que disait Isaïe dans son deuxième chant du Serviteur que nous avons écouté dans la première lecture : « je fais de toi la lumière des nations pour que mon salut parvienne jusqu’aux extrémités de la terre. » (Is 49, 6).
Pour nous résumer, l’« Agneau de Dieu » que nous désigne Jean le Baptiste, est pour nous d’abord et avant tout un don gratuit de Dieu pour l’humanité comme l’agneau donné gratuitement au Patriarche Abraham pour épargner la vie d’Isaac ; il est notre libérateur de la même manière qu’il fut le symbole de libération du peuple d’Israël d’Egypte ; mais surtout, l’«Agneau de Dieu » est ce Serviteur souffrant donné en sacrifice d’expiation pour racheter notre désobéissance par son obéissance au prix de son sang. Voilà pourquoi, à juste dire, Jésus, l’«Agneau de Dieu », peut dire : « Ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui » (Jn 6, 55-56). Finalement sur le plan eschatologique, l’« Agneau de Dieu » est le Nouveau Temple et la Nouvelle Lumière des élus de de Dieu.
Dès lors, si Paul nous souhaite la grâce et la paix, c’est peut-être pour nous dire de faire notre part quotidienne à la mission qui nous est confiée dans l’état et le lieu géographique où chacun de nous se trouve tous les jours pour l’avancement de l’Eglise, mieux du projet salvifique de Dieu.
Frères et sœurs, nous qui formons part du Corps du Christ, soyons donc dignes d’être membre du Nouveau Temple ; soyons dignes de recevoir cette Nouvelle Lumière ; A l’instar de l’« Agneau de Dieu », Dieu lui-même nous appelle implicitement comme baptisés à être ses instruments durant ce Temps Ordinaire « pour que son salut parvienne jusqu’aux extrémité de la terre » (Is 49, 6).
Mon frère ou ma sœur, resteras-tu sourde à cet appel ? Plaise au Seigneur que chacun soit un germe de l’humanité nouvelle. « A vous la grâce et la paix » ! Amen.
Désiré Ayina, sj.
14/01/2023