Homélie du P. Désiré
Ces jours-ci je dispense un cours intitulé : « Management des hommes. » aux ingénieurs de 5 années en formation continue. C’est-à-dire, des gens qui ont déjà une carrière en entreprise et veulent monter en grade. Ils se remettent à l’école pour devenir ingénieurs avec l'espoir désormais de devenir cadres et assumer les responsabilités qui vont avec. Il se trouve que pour la plupart, ils ont fait une mauvaise expérience dans les rapports avec leurs managers. En les écoutant, j’ai été saisi par les rapports de violence qui peuvent exister et certainement existent dans les lieux de travail. Après les avoir écoutés, je leur ai expliqué que l’objectif de ce cours était justement de les aider à ne pas perpétrer des mauvaises conduites ou des abus qu’ils auraient subi de leurs managers quand, à leur tour, ils seront appelés à jouer ce rôle.
En méditant sur l’évangile qui nous est proposé ce dimanche, j’ai envie de dire que Jésus donne une leçon de management. C’est une leçon destinée à tous ceux qui sont appelés à assumer la charge d’autorité. C'est-à-dire tous ceux qui peuvent ou pourraient jouer un rôle décisif dans la vie d’autres personnes. A tous ces futures gestionnaires d’hommes : pères ou mères de famille, autorités religieuses ou civiles, futurs supérieurs hiérarchiques dans nos milieux professionnels (N+ 1 ou N+2 dans le jargon d’entreprise), Jésus dit aujourd’hui : ne faites pas comme les autres, ne répétez pas leurs erreurs : c’est-là le sens de l’expression « pour vous, ... » (Mt 23, 8).
Pour bien se faire comprendre : Jésus égrène trois catégories des mauvais managers (gestionnaires) qu’il voudrait que ses interlocuteurs ne copient pas comme modèles :
Premièrement, ceux qui « disent et ne font pas » (Mt 23, 3b) ; c’est la catégorie de managers dont le langage n’est pas performatif. En d’autres termes, ce qu’ils disent ne peut pas se traduire en action réalisable. De deux choses l’une : soit ils n’ont pas la formation requise mais refusent de s’entourer de bons conseils, des experts en la matière ; soit ils ont la formation mais ne savent pas communiquer pour se faire comprendre. Pour Jésus les paroles de toute autorité doivent se transformer en actes. C’est en ce sens qu’il a pu dire : « Ce n’est pas en me disant : “Seigneur, Seigneur !” qu’on entrera dans le royaume des Cieux, mais c’est en faisant la volonté de mon Père qui est aux cieux » (Mt 7,21).
Deuxièmement, ceux qui « attachent de pesants fardeaux, difficiles à porter, et en chargent les épaules des gens ; mais eux-mêmes ne veulent pas les remuer du doigt » (Mt 23, 4). Cette catégorie est caractérisée de ce qu’on peut appeler le « syndrome du petit chef » : il excelle dans l’art de donner des ordres, joue à l’inspecteur, sollicite rarement l’avis de ses collaborateurs. Il connaît un seul langage : « je t’ordonne, je décide, je suis le supérieur ». Quand il fait l’effort de vous convier à une réunion, c’est déjà avec des idées arrêtées pas pour écouter et prendre en compte les opinions des autres. Ce type d’autorité est aussi dénué de charisme ; n’allez donc pas chercher à comprendre leurs décisions car très souvent arbitraires ou faites du favoritisme. Pour Jésus, il s’agit ici simplement de comprendre que l’autorité est un service et non une domination. L’avoir, le savoir, le pouvoir, que nous avions déjà évoqués dimanche dernier, doivent être pour ceux qui détiennent quelque autorité que ce soit un moyen de louer Dieu dans le service des autres. Ce d’autant plus que tout cela leur est donné comme un Don ; et ils n’en sont que des intendants pour le Bien Commun.
Troisièmement, ceux dont toutes les actions sont faites pour « être remarqués des gens » (Mt 23, 5). Il s’agit ici de la catégorie d’autorités manipulatrices pour la conservation du pouvoir. Incapables de prendre de la hauteur, elles manipulent l’information, restent opaques ou font de la rétention d’information qu’elles distillent à petites gouttes à leurs intérêts. Pour Jésus, l’humilité est le caractère des grands hommes car elle précède la gloire.
On peut alors comprendre qu’après avoir égrené ces caractéristiques du type de managers qu’il ne souhaite pas pour ses interlocuteurs, Jésus termine en disant. « Qui s’élèvera sera abaissé, qui s’abaissera sera élevé. » (Mt 23, 12).
Plaise au Seigneur d’accorder à nos autorités et à tous ceux qui aspirent à assumer un jour des responsabilités la grâce d’entrer dans sa logique afin que nos communautés aient davantage un visage humain et lieux de travail.
P. Désiré Ayina, sj.
Prière Universelle
Vous êtes tous frères, nous dit Jésus.
Prenons dans notre prière tous nos frères et sœurs du monde entier.
Pour l’assemblée des évêques réunis à Lourdes,
Demandons au Seigneur de leur donner un cœur à l’écoute de l’Esprit
pour conduire l’Église de notre pays.
R/ I.1 Seigneur exauce-nous !
Pour ceux qui assument des responsabilités politiques
Demandons au Seigneur de leur donner de les vivre en serviteur de la paix du monde
Pour les peuples déchirés par la guerre, la violence…
Demandons au Seigneur de les garder dans l’espérance
et de faire aboutir les négociations de paix.
Pour les membres de notre assemblée
Demandons au Seigneur de nous donner de vivre en frère et sœur
avec tous ceux qui nous entourent
afin que les hommes découvrent l’amour du Christ pour eux.
Seigneur Jésus, notre Frère,
entends la prière que nous t’adressons et exauce-la.
Toi qui vis et règne pour les siècles des siècles.
Amen