Deux hommes qui marchent dans la même direction, vers le Temple.
Tous deux commencent leur prière de la même manière : Dieu…
Mais la ressemblance s’arrête là.
Le pharisien se tient debout comme pour s’élever à la hauteur de Dieu, traiter d’égal à égal avec lui. Le publicain lui, multiplie les gestes qui maintiennent l’écart entre le Seigneur et lui : il se tient à distance, n’ose même pas lever les yeux au ciel, se frappe la poitrine en signe de repentir. Devant Dieu, l’un se grandit, l’autre s’abaisse.
Le pharisien prie comme s’il se parlait en lui-même. Il part de lui et va vers Dieu : je te rends grâce parce que je…
Le publicain lui parle à Dieu, il lui dit sa requête, le suppliant de venir vers lui dans une demande de faveur toute gratuite : sois-moi favorable. Il s’en remet totalement à la miséricorde de celui qu’il prie.
Le fils de l’homme, étant venu, trouvera-t-il la foi sur la terre ?
Ce dernier verset renoue avec ce que Jésus vient de dire sur la venue du Fils de l’homme à la fin de l’histoire. Le vrai danger ne surviendra pas à cette heure-là. Il consiste à ne pas vivre dans la foi au jour le jour. Comment les disciples pourront ils rester fermes au milieu des épreuves d’une histoire qui semble s’éterniser ? La réponse tient en un mot : prier sans se décourager. Pour l’illustrer Luc évoque cette parabole. Elle lui est propre. Il l’actualise pour les chrétiens des premières communautés.
Un juge une veuve, une ville. Le décor est très vague. L’enseignement de la parabole vaut donc en tout temps et en tout lieu.
Ces dix lépreux font penser à celui que Jésus a déjà guéri en Galilée. Mais d’un récit à l’autre les différences sont grandes. Ici, Jésus ne les trouve pas par hasard, ils viennent à sa rencontre. Ils ne tombent pas face contre terre en l’appelant Seigneur, mais ils élèvent la voix en l’appelant chef, voyant seulement en lui un homme revêtu d’autorité. Ils ne lui demandent pas d’être purifiés, mais se présentent seulement tels qu’ils sont dans leur situation de mis à l’écart. Ils ont entendu dire que Jésus fait des guérisons et ils disent simplement « Aie pitié de nous ! »
Aucun geste de guérison de la part de Jésus pas plus que le prophète Élisée pour Naaman le syrien. Un regard, une parole, c’est tout : « Faites route vers les prêtres ». Pour Jésus faire route, c’est aller vers Jérusalem, c’est affronter sa mort. Pour les lépreux, c’est aller se montrer aux prêtres en croyant à leur guérison. Ils ont donc eux aussi une épreuve à surmonter : croire cet homme. Jésus ne les guérit pas aussitôt comme il l’avait fait en Galilée. Il leur ouvre un chemin de foi très dépouillé : aller en s’appuyant sur sa seule parole, comme Pierre quand Jésus lui demande de jeter les filets. Ils s’y risquent et alors qu’ils sont en chemin, ils sont purifiés, restaurés dans tout leur être, rétablis dans l’alliance avec Dieu.
L’un d’eux, ayant vu qu’il était guéri, reconnait que cela vient de Dieu et le glorifie publiquement. Alors il revient vers Jésus et tombe à ses pieds en lui rendant grâce, lui qui était resté à distance au début. Il voit en Jésus bien plus qu’un chef, mais l’envoyé de Dieu, qui vient de le guérir. Or il est Samaritain, donc exclu de l’Alliance aux yeux des juifs. Mais désormais l’action de Dieu ne connait plus de frontières, sinon celles de la foi ou de son refus.