Tout au long de notre lecture de Saint Jean, nous sommes souvent revenus sur cette première question posée à Jésus par Jean et André lors de leur première rencontre, sur les bords du Jourdain : « Où demeures-tu », c’est à dire « D’où viens-tu ? » Lui n’a jamais cessé de les introduire peu à peu dans son intimité, dans ce secret qu’il voulait leur faire partager, à la fois ce qu’il est pour eux et ce qu’il n’a jamais cessé d’être, le Fils bien aimé du Père.
Eux n’ont jamais cessé de s’interroger à son sujet, d’hésiter pour le reconnaître, de buter sur des paroles ou des comportements qu’ils ne comprenaient pas. Maintenant ils ont la réponse. Ils viennent de lui dire : « Enfin tu parles clair. Nous voyons maintenant que tu sais tout, pas n’est besoin qu’on t’interroge. Cette fois nous croyons que tu es sorti de Dieu » (16.30)
Reconnaître Dieu pour ce qu’il est, c’est toujours une tâche qui rencontre en nous bien des obstacles. Nous le soupçonnons d’être le rival de l’homme, de ne pas vouloir vraiment notre bonheur. Le serpent continue de murmurer à notre oreille : « Dieu vous a menti ». Pour beaucoup cela aboutit à ce que le Père et le Fils soient méconnus, refusés et que Dieu soit finalement exclu en la personne du témoin, le Christ.
L’heure vient où la vérité sur Dieu est rétablie par le Christ. La glorification de Dieu passe par le Christ et aussi par nous « Je trouve ma gloire en eux »(17.10) dit Jésus en parlant de ses disciples.
L’Ascension est un moment clef de la vie de relation de Jésus avec ses disciples, ce moment unique où s’échangent les dernières paroles, les derniers gestes. Moment empreint de tristesse : vous ne reverrez plus mon visage - et de promesse : cette séparation est pour une vie nouvelle en lien avec la précédente, par la parole donnée. Dans ce récit, aucun élément affectif, mais un propos objectif, rationnel : « il fallait que… ». Pas une fatalité, mais la proposition d’une finalité qui s’offre à chacun de nous, l’offre d’un sens large pour tous : d’être témoin, là où je suis, de l’ensemble du sens de l’aventure humaine, un appel à ne pas se replier sur soi, sur son particulier, mais à viser large, un appel auquel je puis répondre en m’offrant…la promesse d’y être alors pleinement accueilli comme une personne, la promesse de la venue de l’Esprit qui m’aidera, qui viendra me rejoindre, me donnera de tenir cette place pour les autres, tous les autres, en y étant moi-même. Je suis pris dans une relation au mystère qui me fait vivre.
Lire la suite : Ascension 2020 - Homélie et Prière universelle
Ce que nous venons d’entendre a été dit par Jésus au cours de son dernier repas avec les apôtres. Jean le voit comme important pour ses propres disciples, alors qu’il est lui aussi, sur le point de les quitter. Dans ce temps qui suit de près le jour de Pentecôte, il cherche à les soutenir par la parole de Jésus. Il sait que son absence va être dure pour eux comme celle de Jésus le fut pour les Douze, malgré les apparitions du Ressuscité.
Il leur redit qu’ils vont avoir accès au Père, mais il sait aussi que l’attente leur paraitra longue, qu’ils vont souffrir de l’absence d’un maître. Ses paroles sont d’abord des paroles de réconfort. Elles visent à les préparer à la réception de l’Esprit, au double point de vue du cœur et de l’obéissance dans l’action. Leur tristesse montre bien qu’ils sont touchés dans leur sensibilité, mais ils doivent regarder l’avenir et agir en fidélité aux commandements reçus. C’est dans l’action que vous avez à montrer votre peine et non dans les larmes « Si quelqu’un m’aime, qu’il garde ma parole » (14/23). C’est dans la manière dont nous avons recours à l’Esprit que cette parole prend toute son importance.