J’entends souvent dire : « Ce n’est pas possible maintenant, la situation n’est pas mûre, les conditions nécessaires ne sont pas encore remplies… Il faut attendre, faire preuve de patience.. » C’est souvent vrai, ce sont mes propres alibis surtout devant une décision difficile à prendre. La plupart du temps, ça n’arrange rien, en particulier s’il s’agit du médecin ou du dentiste. La situation ne fait que se dégrader. Avec l’âge surtout les décisions deviennent de plus en plus difficiles. Pour le médecin, si je tarde trop, le mal risque d’être mortel.
Jésus nous en avertit souvent : « Ne tardez pas à mettre de l’huile dans votre lampe ». A certaines heures, les événements se précipitent. Pensez aux jeunes filles sages et aux insensées. C’est le sens des deux premières lectures que nous venons d’entendre « Aussitôt les gens de Ninive crurent à Jonas » et Paul qui déclare aux Corinthiens : « Frères, je dois vous le dire, le temps est limité et le monde tel que vous le voyez est en train de passer »
Nous savons bien que par ailleurs toute l’Écriture nous parle du temps de Dieu, un temps long, celui des périodes de préparation, de maturation, mais il y a aussi des moments d’accélération de l’histoire, lorsque Jésus appelle les apôtres, Le mot clé, c’est alors « aussitôt » !
Il faudrait peut être nous souvenir nous-mêmes de la première rencontre de quelqu’un qui a marqué notre vie, que nous avons aimé, que nous ne pouvons pas oublier, pour mieux vivre cette scène si riche en détails, où les verbes sont si nombreux.
Tout commence par l’opposition entre Jean Baptiste, immobile, que l’on va voir au désert, et Jésus qu’il désigne comme celui qui passe, va et vient. Nous n’avons pas affaire à une divinité statique, mais à un vivant. Jean le désigne, sans rien dire de plus.
Nous voyons alors les deux disciples se mettre à suivre Jésus.
Pourquoi ? C’est justement ce que veut savoir Jésus, quand il pressent qu’on le suit et se retourne : « Que voulez-vous ? » Origène a noté qu’après six paroles en ce premier chapitre, la septième est de Jésus : « Que voulez-vous ? ». C’est sa première parole. Elle est importante pour nous aider à préciser nos intentions. Une parole toujours actuelle.
Saint Paul vient de nous le dire, dans la seconde lecture : tel est le mystère caché depuis le commencement : Nous sommes tous appelés à ne former qu’un seul corps, aussi différents que nous soyons. Tout a commencé dans la différence, pour nous rappeler qu’aucun d’entre nous, juif ou païen, homme ou femme, surdoué ou débile, ne peut se prendre pour l’universel, pour Dieu. Nous avons besoin de l’autre, des autres, pour exister vraiment. C’est pourquoi Genèse 1 nous montre Dieu créant de la différence, le jour et la nuit, le sec et l’humide, les espèces. L’être humain est créé homme et femme et c’est leur union qui met au monde l’homme, image du divin.
L’épisode des Mages annonce la convergence de tous les étrangers en l’homme nouveau qui vient de naître. Les Mages sont aux antipodes d’Israël, prêtres de l’Iran ancien, lettrés astrologues, souvent moqués dans la Bible. Ils n’ont rien à voir avec les juifs. Leur venue indique que les hommes les plus éloignés du peuple élu, les participants de toutes les cultures finiront par converger vers cet enfant nouveau, comme si l’évangile de Matthieu commençait en nous mettant en présence de la fin des temps.